En juin 2023, le lin a été à l'honneur à la Design Parade Toulon, 7e festival international d'architecture intérieure. Deux duos ainsi qu'un lauréat se présentant à titre individuel ont accepté de nous parler de leur intérêt pour le lin.
Dans le cadre de sa mission de soutien à la jeune création, Alliance for European Flax-Linen & Hemp est partenaire officiel de la Design Parade, autant qu’elle l'est du Festival International de la mode, de l'accessoire et de la photographie de mode de Hyères.
A ce titre, elle a proposé aux finalistes du concours d’architecture d’intérieur du Festival Design Parade Toulon, une sélection de tissus. Ils l’ont intégrée à leurs projets réalisés dans le cadre de cette compétition, lesquels seront exposés pendant toute la durée du Festival et des expositions.
Le Lin européen conjugue aujourd’hui toutes les aspirations écologiques et créatives et est une source d’inspiration pour les nouvelles générations de designers. Cette année, les imaginaires des lauréats de Design Parade Toulon devaient interpréter une pièce à vivre de villa en Méditerranée.
Prix Mobilier National : Emily Chakhtakhtinsky et Marisol Santana - Lou Cabanoun
Cette jeune garde éclairée aux questions écologiques, aime travailler avec les matériaux naturels, le lin en particulier. Grâce au soutien des partenaires de l'Alliance, les lauréats ont pu faire le tour des showrooms dès le mois de mars où leur ont été présentés les différents tissus et les possibilités qu'offre la matière.
Du fait des progrès techniques et des recherches des artisans, le lin ne se froisse pas ; il est thermorégulateur, c'est un tissu d'ameublement idéal.
Emily Chakhtakhtinsky et Marisol Santana se sont rencontrées à l'Ecole Boulle. La première est architecte, la seconde, designer textile et set-designeuse (designer d'espace). Depuis le départ, elles souhaitaient travailler le lin dans leur projet Lou Cabanoun, cabane ruche en pierres sèches, lieu refuge réunissant les abeilles et les humains.
"Ma mère a travaillé dans l'industrie du lin”, explique Marisol. “J'ai toujours eu du lin chez moi, dormi dans des draps en lin. Du fait des progrès techniques et des recherches des artisans, le lin ne se froisse pas ; il est thermorégulateur, c'est un tissu d'ameublement idéal. Non seulement il ne prend pas les odeurs mais il a cette élégance naturelle et modeste. Nous recherchions une matière naturelle qui se prêtait à la teinture.”
Et le duo de poursuivre : “au Linen Dream Lab, (lieu ressources de l'Alliance ouvert à tous les créateurs), on a pu faire des tests et préciser nos besoins car nous voulions pouvoir teindre la matière en obtenant un rendu particulier. Nous avons opté pour un voile de lin avec un aspect très aérien, au toucher très doux et velouté diffusant la lumière par la trame de façon très graphique et une étoffe de lin. Nous allons aussi teindre des rubans en doublé sergé dont l'absorption de teinture est différente", précisent les deux candidates.
Leur projet, qui renvoie à l'architecture des apiès provençaux (murs avec niches naturelles pour abeilles) et questionne sur la viabilité des espaces à l'heure du réchauffement, rend hommage à l'abeille noire de Provence.
La fibre végétale de lin s'inscrit naturellement dans leur souci de privilégier les matériaux bruts pour cette installation pensée comme une expérience écologique (cire, pierre, vannerie, émaux, terre) et rend hommage au travail de la main et aux savoir-faire (murailler, artiste-vannier, céramiste reproduisant des techniques arméniennes...).
L'installation met en valeur ces métiers qui puisent la matière dans l'environnement en étant attentifs à son cycle de vie tout en respectant les techniques ancestrales.
Grand Prix Design Parade Toulon Van Cleef & Arpels : Clément Rosenberg - Chambre tapissée pour cigale en hiver
S'il avait pu pousser plus loin encore son intention, Clément Rosenberg, de son côté, n'aurait utilisé que du lin. Son installation, “Chambre tapissée pour cigale en hiver”, représente une chambre tapissée d'étoffes, métaphore du refuge hivernal d'une cigale dont la particularité est de passer six ans sous terre sous forme de larve. Le designer a travaillé autour d'un blason évocateur du littoral français orné de cet insecte typique du sud méditerranéen. Le travail sur les couleurs y occupe une place de choix.
Clément Rosenberg a travaillé avec des teintures naturelles. Le lin joue un rôle central dans cette scénographie qui repense le décor intérieur tapissier à l'époque contemporaine en interrogeant les liens entre esthétique et confort.
A l'image des autres designers de sa génération, sa sensibilité à la naturalité des matériaux et des teintures l'a amené à utiliser le lin en quantité. Ce dernier est présent sous forme d'étoffes de tentures grâce au soutien du partenaire de l'Alliance, le belge Libeco, en drapé, et jusque dans le rembourrage des matelas capitonnés qui confèrent à l'installation cette dimension médiévale. "J'apprécie ses qualités techniques, son tombé sec doublé d'un certain leste”, explique le designer de 31 ans diplômé de l'Ecole Duperré en design textile et de l'ENSCI, par ailleurs enseignant.
Mais ce qui intéresse aussi ce lauréat, ce sont ces fameuses propriétés tinctoriales du lin "qui en lui-même module la teinte tout en régulant l'humidité de la pièce". Sensible à la dimension vertueuse de la matière, cette jeune garde de designers est aussi préoccupée par les questions d'impact.
Prix du Public : Hadrien Krief et Théophile Chatelais - Les heures chaudes
Quel rôle l'architecture intérieure peut-elle avoir dans le contexte de réchauffement climatique ? Le lin utilisé sous forme de grand-voile est comme une métaphore des réponses possibles de la création à cette urgence.
De par ses propriétés techniques, cette grande laize, sans couture peut être ainsi disposée devant une fenêtre, pour moduler l'air et pourquoi pas être recouverte d'eau pour apporter un peu de fraîcheur ?
Ce duo d'architectes, formé par Hadrien Krief et Théophile Chatelais, recherchait pour son projet un tissu à capillarités qui portait en lui cette dimension de frais. Toute la pièce est pensée autour d'un grand thermomètre de 80 cm de haut, sensé être "l'objet guidant nos usages afin que nous nous rapprochions de la fenêtre pour aller humer l'air frais, du bassin, des pierres fraîches, ou de ce lin aux propriétés thermorégulatrices." Sur la route de ces propriétés vertueuses, le lin, fibre végétale européenne ouvre la voie de tous les possibles.
{{message}}